Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF)

 

Entretien avec Maître Tiphaine BERNARD, LightHouse LHLF - Société d’Avocats

 

Propos recueillis par Ghenadie RADU, Dr en droit, Altaprisma

 

Paris, le 26 avril 2024

 

 

Altaprisma : Merci d’avoir trouvé le temps de nous accorder cet entretien. Pourriez-vous vous présenter brièvement, s’il vous plaît ?  

 

Me Tiphaine Bernard : Avocate en droit douanier, j’exerce en tant que collaboratrice-manager au sein du Cabinet LightHouse LHLF, spécialisé en droit douanier, TVA et fiscalité internationale, depuis les bureaux de Lyon.

 

 

Altaprisma : Que devons-nous entendre par le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) ?

 

Me Tiphaine Bernard : Le MACF est un nouvel instrument règlementaire européen adopté en mai 2023 visant à soumettre les produits importés dans l’UE à une tarification carbone équivalente à celle appliquée aux industriels européens dans des conditions de fabrication similaires. Il s’agit en d’autres termes d’une « taxe carbone » qui sera calculée en fonction des émissions carbone liées à la production des produits importés. Avec ce nouveau mécanisme, l’Union européenne espère éviter les « fuites de carbone » liées aux délocalisations, mais également encourager les Etats tiers à adopter des règlementations plus contraignantes concernant les émissions carbones. 

 

 

Altaprisma : Le MACF conditionne l’importation de certains produits industriels (acier, aluminium, engrais, ciment, hydrogène, électricité) au respect de plusieurs obligations. En grandes lignes, quelles sont les obligations des importateurs au regard du MACF ?

 

Me Tiphaine Bernard :  Pour répondre à cette question, il est nécessaire de différencier la phase transitoire, qui a débuté le 1er octobre 2023, de l’application effective du MACF à compter du 1er janvier 2026.

 

Durant la phase transitoire (phase déclarative), les opérateurs qui importent et mettent en libre pratique des produits visés par le règlement établissant le MACF, devront calculer et déclarer les émissions carbones liées à la production de ces produits. A la fin de chaque trimestre, les opérateurs devront déposer un rapport reprenant notamment les quantités de produits importés et les émissions directes et indirectes liés à ces produits.

 

A partir du 1er janvier 2026, les opérateurs devront nécessairement obtenir le statut de « déclarant MACF autorisé » pour pouvoir importer les produits visés. Il sera également nécessaire d’acheter des certificats MACF en respectant les conditions du stock minimum (stock correspondant à 80% des émissions importées à date à la fin de chaque trimestre).

 

Annuellement, les opérateurs devront déposer une déclaration MACF et restituer les certificats MACF correspondants.

 

 

Altaprisma : Comment le MACF fonctionnera-t-il dans la pratique ? Quels sont les points de vigilance ?

 

Me Tiphaine Bernard :  Très bonne question ! Il reste encore beaucoup d’inconnues tant pour les opérateurs que pour l’administration. Ce qui est sûr c’est que les opérateurs concernés doivent se rapprocher de leur fournisseur pour collecter les données pertinentes et les déclarer sur la plateforme MACF.

 

L’administration française a d’ores-et-déjà annoncé une période de tolérance au moins jusqu’en juillet 2024 au cours de laquelle les opérateurs pourront utiliser des valeurs par défaut, mais celle-ci risque d’être courte. Il est donc nécessaire de se mettre en ordre de bataille dès à présent.

 

Dès le 1er janvier 2026, seul les déclarants MACF autorisés pourront importer les produits visés. Il faudra donc, dès 2025, solliciter ce statut pour éviter tout risque de blocage.

 

 

Le mot de la fin

 

Me Tiphaine Bernard : La mise en place du MACF est effrayante pour un grand nombre, si ce n’est l’intégralité des opérateurs concernés. Il faut reconnaitre que la collecte des données relatives aux émissions carbone et les méthodes de calcul nous paraissent quelque peu compliquées à l’heure actuelle.

 

La phase transitoire permet justement aux opérateurs de s’adapter et d’identifier les bons interlocuteurs en interne, chez leurs partenaires commerciaux, mais également auprès de prestataires externes.  

 

Altaprisma : Nous vous remercions pour vos éclairages.     

 

 

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